Dans la Musette
Tour de France

Tour de la France, étape 16 : cocorico !

La-Tour-du-Pin – Villard de Lans (164 km)

L’échappée du jour a vite pris forme, avec ni plus ni moins qu’une quinzaine de coureurs dans le premier paquet ! Après une vaste opération de contrôle de la part de Lotto-Soudal (équipe du maillot jaune Thomas De Gendt) et d’Arkéa-Samsic (équipe du second, Nérokintana) qui ont joué les videurs de service, aucun coureur échappé n’était jugé assez dangereux au général pour mériter d’être repris. Les fuyards ont donc eu le droit de prendre le grand large dans le Col de Porte (où Richie ne s’est pas arrêté pour inaugurer une plaque à son nom puisque le col n’a pas été baptisé en son honneur, faut pas déconner non plus). À son sommet, Pierre Rolland évidemment présent parmi les quinze, a récolté ses points du maillot à pois avec près de 9 minutes d’avance sur le peloton, qui a décrété qu’il ne jouerait pas la victoire d’étape aujourd’hui.
Au lendemain d’une journée de repos, la prudence est de mise. Le maillot jaune semble quant à lui tout à fait serein et retapé après cette courte oasis de paix et d’inaction, malgré les nombreuses sollicitations médiatiques de la part des chaines du plat pays qui rêvent de trouver en lui le successeur de Van Impe. 1976, ça commence à dater : même Alejandro Valverde n’était pas né !

El Pedrito Nacional continue de moissonner dans la Côte de Revel et l’échappée poursuit pépouze sa route vers Villard de Lans, où elle va se déchiqueter dans les pentes de la Montée de Saint Nizier du Moucherotte (encore désolé, nous ne sommes en aucun cas responsables des noms des cols sur ce Tour). Warren Barguil, tout à fait à l’aise dans ses couleurs bleu-blanc-rouge en ce 14 juillet, a coché cette étape d’une grosse croix rouge et ça se voit ! Il est irrésistible dans l’ascension et sème ses compagnons d’échappée en compagnie de Pello Bilbao (Bahrain-McLaren), Omar Fraile (Astana) et Emmanuel Buchmann (Bora-Hansgrohe).
La foule est imposante et plus colorée que jamais. On y découvre des hurluberlus déguisés comme jamais aux couleurs de la France : des costumes de poulet aux masques de Jacques Chirac (on a même vu un Balladur et un Jospin), en passant par des Obélix et des danseuses de French cancan, tout y passe pour saluer la beauté de la douce République de René Coty en ce jour de fête !

Cela donne des ailes à Barguil, qui sifflote la « Tribu de Dana » en montant des dents dans la montée, faisant tout d’abord péter Bilbao à qui il lance un malin « Wesh Pello, à tout à l’heure ! ». Après le sommet, on arrive dans la portion de 10 kilomètres en replat et les désormais trois hommes de tête collaborent à merveille pour éviter le retour du coureur d’Astana. Enfin : les voici qui se frottent au dernier raidard final ! Wawa, alors qu’un breton beurré au cidre doux court à ses côtés en jouant du biniou, lève le cul de sa selle et fait exploser Fraile. Il se retourne et lui assène avec un rictus malicieux : « Alors Omar, t’es cuit ? T’es tout rouge ! » avant de relancer de plus belle pour essayer de se défaire de Buchmann, plus collant qu’un sparadrap oublié trois jours sur un coude meurtri.
L’allemand s’accroche, et semble souffrir dans la roue du breton qui s’arrose avec un litre de chouchen tendu par un supporter (Loïc le Kervadec, 36 ans et contrôleur de gestion dans le civil, quand il n’est pas déguisé en plaquette de beurre demi-sel au bord de la route du Tour). Requinqué, Wawa se dresse de plus belle et envoie la purée : Buchmann ne peut rien faire d’autre que rester derrière, impassible et incapable de se mettre en danseuse derrière le morbihannais déchainé comme un fan de Tri Yann au festival interceltique de Lorient.
Il reste 200 mètres quand Barguil lance son sprint, lequel n’est pas disputé par son adversaire, obligé de se rasseoir en hochant la tête. Wawa a tout le temps de réajuster son sublime maillot tricolore et de triompher en chantant un air du Bagad de Lann-Bihoué. Quelle victoire, quelle atmosphère ici sur la ligne ! Il vient de valider son ticket définitif pour la gloire éternelle dans le coeur du public français, lui qui revient de plus loin qu’un aller-retour Haguenau-Pointe du Raz.

Dans le peloton des favoris, quelques minutes en contrebas, on s’attaque mollement et il semble que le but premier de ces timides manoeuvres soit d’épuiser un De Gendt esseulé depuis longtemps (il faut dire que son équipe n’est pas venue sur le Tour avec l’idée de défendre un maillot jaune en troisième semaine). Et ça fonctionne : le belge décroche enfin sous l’impulsion de Gaudu (Groupama-FDJ), bien aidé par Kruifkldlkjijd (Jumbo-Visma) qui font le forcing pour leurs leaders à 3 kilomètres du sommet de la Montée de Saint Nizier du truc-muche. C’est par ailleurs l’avant-dernière occasion de faire exploser le sanglard d’outre-Quiévrain sur une arrivée au sommet (sans compter le CLM de la Planche des Belles Filles), alors tous les leaders y mettent du coeur à l’ouvrage.
De Gendt, aussitôt lâché, passe son fameux mode diesel et se laisse ronronner sans aller dans le rouge 40 secondes derrière ce beau monde qui semble soulagé de mettre à distance ce maillot jaune encombrant. Mais l’increvable bestiole s’accroche et recolle, inlassable ! À la faveur de la portion roulante sur plus de 10 kilomètres avant le pétard final, mais surtout grâce à l’inaction du groupe de favoris qui se regardent en mode « Now what ? »… Voilà notre tracteur qui revient au milieu des cracks. Incroyable !

Dumoulin en a marre de voir sa gueule, et accélère brutalement dès le pied de la rampe d’arrivée. Ce coup de cul final brûlera les cuisses du belge jusqu’à l’os et il lâchera à nouveau du lest, incapable de remettre le mode diesel en marche cette fois-ci et ne pouvant se contenter que d’exploser littéralement, presque arrêté. Mais il limitera la casse avec brio, arrivant seulement 20 secondes derrière les leaders restés groupés. Ces derniers ont décrété que le juge de paix serait demain, dans le Col de la Loze, et n’ont pas cherché à s’agresser outre-mesure. Puis il restera une étape voltigeuse vers la Roche sur Fauron et enfin le contre-la-montre de la Planche. Tôt ou tard, ils réussiront bien à définitivement se débarrasser de De Gendt.

Non ?

Classement général :

1. Thomas De Gendt (LTS)
2. Nairo Quintana (ARK) + 2’04’’
3. Mikel Landa (BAH) + 2’32’’
4. Thibaut Pinot (GPF) + 2’39’’
5. Miguel Angel Lopez (AST) + 2’39’’
6. Sergio Higuita (EF) + 2’39’’
7. Primoz Roglic (JBV) + 2’40’’
8. Julian Alaphilippe (DCQ) + 3’12″
9. Christopher Froome (INE) + 3’18’’
10. Tom Dumoulin (JBV) + 3’22’’
11. Egan Bernal (INE) + 3’28’’
12. Geraint Thomas (INE) + 3’32’’
13. Steven Krujidfdksie (JBV) + 3’35’’
14. David Gaudu (GPF) + 4’19’’
15. Alejandro Valverde (MOV) + 4’27’’
16. Tadej Pogacar (UAE) + 4’39 »

Maillot à pois : Pierre Rolland

Maillot vert : Peter Sagan

Maillot blanc : Sergio Higuita

Combatif du jour : Emmanuel Buchmann

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